
Comment capitaliser sur les ressources naturelles pour lutter contre les risques liés à l'eau ?
July 19, 2024
Ecrit par Ellen Shaddock
Sustainability Officer chez AXA XL
La résilience à l’égard de l’eau fait depuis longtemps partie intégrante de notre stratégie de développement durable, à l’instar de la protection de la nature qui est au cœur de nos préoccupations.
Augmentation de la demande, mauvaise gestion ou encore changement climatique ; autant de facteurs pouvant entrainer une raréfaction des ressources en eau, et dont l’impact se fait ressentir partout dans le monde, tant auprès des communautés qu’au sein des entreprises. Le développement de solutions fondées sur la nature, telles que la restauration des habitats naturels, est l'un des concepts retenus pour relever les défis sociétaux et environnementaux. Renforcer notre résilience collective face aux risques liés à l’eau impose que nous affinions notre compréhension quant au fonctionnement de ces solutions et que nous réfléchissions ensemble aux adaptations nécessaires.
É«¶à¶àÊÓÆµa récemment réuni l’ensemble de ses collaborateurs lors d’un webinaire organisé sur le thème de l'utilisation de solutions basées sur la nature pour réduire les impacts du changement climatique sur les sécheresses et autres catastrophes naturelles. A cette occasion, le Dr Petra Holden, une scientifique spécialisée dans la conservation de la biodiversité de l'Initiative africaine pour le climat et le développement à l'Université du Cap, et récente lauréate du Prix É«¶à¶àÊÓÆµClimate Water Nexus, lancé conjointement avec AXA Research Fund, est intervenue.
La Professeure Holden a ainsi expliqué que les solutions basées sur la nature sont majoritairement des actions liées à la restauration, à la protection, à la gestion durable et à la conception d'un large éventail d'écosystèmes et de biodiversités terrestres et aquatiques. Leur objectif est de réduire les risques associés au changement climatique et peuvent inclure, par exemple, la plantation de végétation dans les zones urbaines, la restauration de la végétation le long des rivières ou des montagnes pour limiter les impacts des sécheresses ou des inondations, la restauration des zones humides côtières pour se protéger contre l'élévation du niveau de la mer, ou l'utilisation de principes agroécologiques pour protéger les cultures contre les événements climatiques.
Les bénéfices de ces techniques, qui s’appuient sur une approche flexible et pluri disciplinaire ne s’arrêtent pas là. Elles contribuent en effet à assurer la sécurité alimentaire, limiter les conséquences qu’ont les catastrophes naturelles, et atténuer les risques hydriques. Mme Holden explique que depuis le début des années 2000, de nombreuses études scientifiques ont montré comment les solutions fondées sur la nature peuvent contribuer à réduire les effets des phénomènes climatiques. Elle précise par ailleurs que des études complémentaires doivent être menées pour comprendre l’impact de ces solutions sur la qualité des sols.
Mme Holden et une équipe de chercheurs ont entrepris de mettre au point un afin de déterminer si et comment les solutions fondées sur la nature peuvent réduire ou compenser les impacts du changement climatique sur un événement extrême. En d'autres termes, il s'agit d'évaluer comment les solutions liées à la nature peuvent atténuer les effets négatifs du changement climatique sur les événements extrêmes. Pour mener cette étude, les scientifiques se sont penchés sur le cas d’une sécheresse aigue en Afrique du Sud et ont examiné l'efficacité d'une solution fondée sur la nature pour réduire les effets d'un événement catastrophique engendré par le changement climatique.
Le jour zéro de la sécheresse
Entre 2015 et 2018, la ville du Cap a souffert d'une sécheresse grave et prolongée, surnommée "Day Zero Drought", au cours de laquelle les 4 millions d'habitants de la ville ont failli se retrouver sans eau. En écho à un drame évité de justesse, l’ONG « The Nature Conservancy », engagée dans la lutte contre la double menace du changement climatique et la perte de biodiversité, a œuvré pour qu’une solution basée sur la nature soit mise en place afin de tenter d'atténuer l'impact d’une prochaine sècheresse. Bien que cela puisse sembler contre-intuitif, l'élimination de milliers d'arbres non indigènes sur des versants montagneux a permis de renforcer l'approvisionnement en eau, évitant que cette dernière ne soit absorbée par ces arbres exogènes gourmands en eau.
Mme Holden et son équipe ont modélisé la sécheresse "Day Zero" et simulé les débits des cours d'eau selon quatre scénarios différents :
- aucun impact du changement climatique ;
- ajout des impacts du changement climatique,
- solutions fondées sur la nature : avec élimination des arbres non indigènes ;
- situation dans laquelle les arbres non indigènes ont été autorisés à proliférer.
Les chercheurs ont constaté que le changement climatique avait aggravé la sécheresse et réduit de 22 % la quantité d'eau dans les rivières. Les travaux ont démontré que l'élimination des arbres non indigènes ont réduit les effets du changement climatique et permis d'augmenter de 9 % la quantité d'eau dans les rivières. Laisser les arbres continuer à proliférer aurait considérablement aggravé les effets de la sécheresse.
Toutefois, l'étude a clairement montré que la restauration de l'environnement par l'élimination des arbres non indigènes n'était pas suffisante pour inverser les effets du changement climatique sur les résultats de la sécheresse. Les solutions fondées sur la nature peuvent contribuer – de façon très significative - à réduire les effets des événements climatiques extrêmes, mais elles ont des limites et ne peuvent pas, à elles seules, compenser les effets du changement climatique.
Il y a donc une nécessité de combiner les solutions fondées sur la nature avec d'autres adaptations, telles que la gestion de la demande d'eau, notamment dans les régions sujettes à pénuries. A l’avenir, la réduction des émissions est également essentielle pour garantir l'efficacité des solutions fondées sur la nature. L'application d'un cadre stricte peut aider les communautés et les décideurs politiques à comprendre où se situent ces limites et quelle combinaison d'actions est la plus appropriée pour fournir une réponse équitable, efficace et durable.
Le webinaire a également abordé les questions sociales, dans le développement et le déploiement de solutions basées sur la nature pour lutter contre les effets du changement climatique. Là encore, insiste la Professeure Holden, la connaissance du contexte local est nécessaire pour garantir la mise en œuvre de solutions équitables, efficaces et durables fondées sur la nature, parallèlement à d'autres techniques appropriées d'adaptation au changement climatique. Pour en savoir plus sur les travaux du Dr Holden dans ce domaine et .
Investissement responsable
Avec son équipe de chercheurs, la professeure Holden a également mis en exergue la nécessité d’investir dans les solutions basées sur la nature - en particulier en Afrique australe - et a constaté qu'il y avait de nombreux avantages sociaux et environnementaux potentiels, tels que l'amélioration de la sécurité et de l’approvisionnement en eau ; un sentiment positif de sécurité sanitaire pour les communautés ; une réduction du risque d'autres scénarios comme les incendies de forêt ; des possibilités d'emploi pour les travailleurs non qualifiés qui aident à mettre en œuvre la solution basée sur la nature et l'amélioration de la qualité de la biodiversité.
Ces solutions peuvent également contribuer à réduire les risques liés à la chaîne d'approvisionnement pour les entreprises qui dépendent de l'approvisionnement en eau - un risque qui est d’ailleurs sous-estimé, selon le Water Risks Insights d’AXA XL.
Pour les investisseurs, les bénéfices sont nombreux : rendement des obligations ou d'autres mécanismes financiers, réduction des risques sur les sites impactés, diminution des pertes d’exploitations suite à un phénomène climatique extrême, ou encore valorisation de la responsabilité sociale de l'entreprise et impact positif en matière de réputation.
Chez É«¶à¶àÊÓÆµ nous avons pleinement conscience du rôle que les assureurs ont à jouer : en améliorant la compréhension des risques, en élaborant des solutions et des services de prévention, de gestion et de transfert de risques liés au changement climatique, et cela passe également par un accompagnement en matière de solutions basées sur la nature. Dans le cadre de notre stratégie de développement durable et de notre collaboration avec AXA Research Fund et d'autres partenaires, nous poursuivons notre mission d’exploration et d’apprentissage continue en matière de risques liés à l'eau afin d’accompagner nos clients à atténuer et à gérer les impacts du changement climatique.
Petra Holden est une scientifique spécialisée dans la conservation de la biodiversité au sein de l'African Climate & Development Initiative (ACDI), à l'université du Cap (UCT). Elle est spécialisée dans la recherche de solutions basées sur la nature pour un avenir climatique équitable, biodiversifié, sécurisé en eau et durable. Petra dirige actuellement une équipe de recherche à l'ACDI, qui entreprend des recherches pour fournir des preuves sur les solutions fondées sur la nature qui tiennent compte des processus d'équité sociale et de durabilité compte tenu des changements climatiques. Pour plus d'informations sur les recherches de Petra, voir Google Scholar, TES NbS, ACDI.
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